Retour sur les projections de sièges – Alberta 2019
Publié : 2019/04/23 à 17:17 . Classé dans : Non catégorisé Poster un commentaireLe 16 avril dernier se déroulait l’élection générale en Alberta, remportée majoritairement par un parti inédit résultant de la fusion des partis de droite (UCP). On sait maintenant que le NPD albertain au pouvoir n’aura été qu’une parenthèse, précédée de quarante années de gouvernement conservateur, revenu sous une forme unifiée.
Dans la suite de mon analyse des projections électorales, publiée en novembre 2018 après l’élection au Québec, je regarde celle de l’Alberta avec la même méthodologie. Nous regarderons cela en 3 segments:
- Les sondages comparés aux résultats de l’élection
- Les macro-projections et l’indice M/S
- Les micro-projections
D’abord, les sondages, matière première des projections.
Les sondages ont systématiquement sous-évalué l’UCP et surévalué le NPD, comme l’indique le graphique suivant:
Les derniers sondages de 7 sondeurs montrent tous un plafond et un plancher que l’élection a traversés allègrement. Un calcul sommaire (non pondéré) indique une sous-estimation moyenne du NPD d’environ 5% et une surestimation du UCP de presque 7%. C’est plutôt mauvais comme performance des sondeurs.
Comme ce n’est pas mon propos principal, je ne m’étendrai pas davantage. Je n’ai d’ailleurs pas compilé moi-même les sondages, je me fie à le source suivante: https://en.wikipedia.org/wiki/2019_Alberta_general_election#Opinion_polling .
Les macro-projections
Pour rappel, les macro-projections sont les projections en termes seulement de total de sièges par parti, sans déterminer l’élu projeté par circonscription. Ces macros ne sont en soi ni sérieuses ni justes ni dignes de s’y arrêter individuellement sauf si elles reposent sur une micro-projection publiée dans le détail, ce qui est rare. Néanmoins, l’ensemble des macro-projections formant un ensemble, une « industrie » de la projection, on peut y attribuer un indice permettant la comparaison de cette « industrie » d’une élection à l’autre. Cet indice se calcule selon la formule M/S, où M est l’erreur médiane des macro-projections et S est le nombre de sièges.
Un indice plus élevé montre une moins bonne projection moyenne de l’industrie.
Pour l’élection albertaine 2019, j’ai trouvé une dizaine de macro-projections, l’indice M/S vaut 0.09. Je remets mon tableau qui agrégeait les indices des dernières élections pour lesquelles j’ai fait l’exercice d’analyse.
Voici le graphique réunissant ces macro-projections de 2019:
Tel que décrit dans mon analyse de novembre, l’indice M/S dépend de certaines variables:
- la qualité des sondages (mauvais en l’occurrence)
- le nombre de partis compétitifs (seulement deux en Alberta)
- les nouveaux joueurs improvisés projectionnistes (sur les 10 repérés, 7 m’étaient déjà connus, donc assez peu d’improvisés)
Ici, certainement, le petit nombre de partis compétitifs a favorisé un indice très bas. D’ailleurs, les micro-projections vont aussi dans ce sens.
Les micro-projections
J’ai trouvé 7 micro-projections:
*: Les sites marqués d’un astérisque sont les seuls à détailler, outre la projection des gagnants, la projection d’au moins un rang supplémentaire.
Avertissement: Il arrive que les totaux des micro-projections soient différents des macro-projections, notamment chez R, ou que plusieurs versions des projections existent simultanément (par exemple selon la langue ou selon la région) et qu’on y trouve des divergences entre elles. D’autre part, une certaine manipulation des données est requise pour extirper et mettre côte à côte les micro-projections puisque chacun choisit sa propre présentation, souvent sous forme de cartes ou de codes-couleurs inutilisables directement. J’espère n’avoir pas fait d’erreur lors de ces patientes manipulations. Enfin, comme dans mon analyse de novembre 2018, les projections attribuent un parti à un rang, même si ce n’est pas statistiquement clair. Il n’y a pas d’égalité acceptée dans le cadre de cet exercice, question de pouvoir comparer les projections. En ce sens, c’est injuste pour ceux qui projettent des « indécidables » ou « imprédictibles », ou « pivots » pour reprendre le terme de Qc125.
Voici donc la comparaison des micro-projections pour les élus puis pour la seconde position:
On peut constater une forte ressemblance, à l’exception d’une projection; et cette similarité est bien sûr d’abord due au fait qu’il n’y a que 2 partis compétitifs et que bon nombres de circonscriptions sont facilement prévisibles.
On constate qu’à part E (très mauvais), personne ne se démarque vraiment du peloton.
8% de non-conformité (c’est-à-dire de ne pas avoir su projeter le bon gagnant), c’est un comté sur 12 environ. Pour comparaison, je reprends les chiffres de l’élection québécoise de 2018, élection bien plus difficile en raison des fréquentes courses à 4: les meilleures projections ont obtenu 10% et 12% de non-conformité de l’élu. Aussi, je ne suis pas impressionné par les projections pour l’Alberta compte tenu de sa relative simplicité. Surtout si on les juxtapose l’indice M/S particulièrement bas.
J’avais proposé un objectif de qualité à atteindre: 3% pour le premier rang et 6% pour le second. On en est encore bien loin.
Mais qui s’intéresse à ces activités de divination et à leur efficacité réelle une fois les événements tombés dans le passé? Non que je sois contre – elles sont là pour rester — mais je veux qu’on soit conscient de leur part de marketing et de fiction. Comme pour les sondages d’opinion.